2) La lutte finale
Moi et Bixente, un ami, cheminions ensemble dans les rues de Toulouse pleines de gens qui manifestaient. 60 000 personnes dans les rues, c'était un joli score. Ensuite nous sommes allés voir Jean-Luc Mélenchon à un comité du Front de Gauche à la faculté de sciences po, parce que ç'avait l'air intéressant, et que quelqu'un qui a assez de couilles pour divorcer du PS et exprimer ses idées est quelqu'un à écouter, au moins.
Nous avons donc écouté. M. Mélenchon (Jean-Luc comme l'appelaient les gens dans la salle) a donc parlé pendant deux heures de socialisme, de gauche unie contre la marchandisation de l'Europe et le complot qui vise à mettre chacun au pas du libéralisme. Il a parlé d'humanité, de bravoure, des ses amis du PC et de ce que NOUS pensions vraiment, nous, les gens.
Tous les deux, nous étions sur un petit nuage. Quelqu'un qui parle comme ça, qui donne la parole aux gens et surtout qui reste accessible et répond aux questions, c'est rare. Se pourrait-il que ce soit un mec bien ?
Aux trois quarts de la séance, j'ai exposé à la fois mon idée et celle de mon ami Bixente, que je n'oubliais pas - en trichant un peu. J'ai dit que j'étais moi même basque et que j'avais honte de ce pays qui lèche les pieds des USA en réintégrant l'OTAN, et que la mission des hommes politiques de ce pays c'était de redonner confiance aux gens parce qu'au pays Basque, plus personne n'a confiance.
Il m'a répondu en me disant que j'étais dans le juste : il faut redonner de l'espoir aux gens. Puis il a continué. On a tiqué quand il a parlé d'Etat-Nation, et encore plus quand il a dit être "Républicain jusqu'au bout".
Après la conférence Bixente est allé lui poser la question : la République unie et indivisible, d'accord. Une "nouvelle Europe" d'accord. Mais donnera-t-on enfin la parole à mon peuple ?
J-L M : nous sommes une grande nation, nous avons fait des tas de choses bien, je suis fier d'être français et je respecte les langues régionales, la votre doit être très belle, mais nous devons rester unis et indivisibles, c'est mon avis
Bixente : je ne parle pas de séparatisme, je parle juste de donner une voix aux miens.
J-L M : mais vous êtes quoi ? vous êtes français !
Bixente : non, je suis basque.
J-L M : Qu'est-ce qu'il y a marqué sur votre carte d'identité ?
Bixente : "français", mais j'y crois de moins en moins. Chez moi j'avais mes anciens qui me disaient de tuer de flics français pour notre honneur, et de l'autre côté l'école qui me parlait de la France, cette Nation, Nation, Nation par çi, Nation par là. J'ai bien dû faire un choix. Mais je ne suis pas français.
(silence)
J-L M : Et moi alors ? Ou est-ce que je peux vivre ? Et mes enfants ils peuvent vivre quelque part aussi ? Et mes enfants ils doivent apprendre quelle langue ? Je respecte les langues régionales, mais leurs défenseurs ont des actes anticonstitutionnels ! Maintenant, j'ai des choses à faire, au revoir.
Il commença à partir puis Bixente lui dit simplement : "Il y a chez moi des jeunes de 16-17 ans qui sont prêts à prendre les armes. Devinez pourquoi."
Peu après, nous repartions, et nous ne savions que dire. Bixente, lui, prononça une phrase :
"Mais pourquoi les gens commencent-ils à comprendre uniquement au moment où une bombe explose devant chez eux ?"
Finalement, ce monsieur Mélenchon est comme les autres. Il n'a aucune idée de ce que peuvent ressentir un peuple vaincu et qu'on traite comme s'il n'existait pas. Alors oui, la France peut changer, l'Europe aussi, on peut enfin avoir un vrai gouvernement à gauche, on peut enfin à nouveau marcher tête haute et ne plus avoir peur ! ... quant à nous nous resterons toujours nous-mêmes : des soldats perdus.